Vers l’exclusion des travailleurs salariés immigrés sans papier
des droits à réparation en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle
Communiqué 12 avril 2016
Alertés par l’Observatoire du droit à la santé des étrangers (http://www.odse.eu.org/REFORME-DE-LA-PROTECTION- MALADIE) concernant la protection sociale des travailleurs étrangers, nous découvrons que le gouvernement s’apprête à confirmer par décret une disposition introduite subrepticement dans la loi sur la protection universelle Maladie (PUMA), qui détruit le droit des travailleurs étrangers dépourvus de titre de séjour à obtenir reconnaissance et indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP) dont ils seront victimes. Le projet de décret relatif au contrôle des personnes bénéficiant de prestation de sécurité sociale prévoit de soumettre l’accès à l’indemnisation AT/MP à une condition de séjour. Il s’agit d’une mesure gravissime, qui octroie aux employeurs le droit d’exposer des salariés sans papiers à des dangers graves ou mortels, en sachant que ces travailleurs n’auront plus aucun recours pour obtenir la raparation des préjudices subis. Cette disposition donne aux employeurs toute latitude – en toute impunité – pour accroître le recrutement de travailleurs sans papiers tout en réduisant de façon drastique toute démarche de sécurité dans les « sales boulots » qui leur sont réservés, dans le nettoyage (par exemple : http://www.ulcgt11.fr/?GREVE-DES-SALARIES-DU- NETTOYAGE-DE-PARIS-HABITAT), mais aussi le BTP, la restauration rapide, la manutention, etc….
Depuis leur création en 1898 et 1919, les AT/MP, qui relèvent aussi du code du travail, n’ont jamais été conditionnés à la régularité du séjour. Quand, en 1993, la loi « Pasqua » sur l’immigration a introduit la condition de régularité de séjour à quasiment toutes les dispositions du code de la Sécurité sociale (assurances maladie-maternité, vieillesse, invalidité, décès, AAH, minimum vieillesse…), elle ne l’a pas fait pour les AT-MP. Le confirme la rédaction très claire de l’article L.411-1 CSS qui ne prévoit pas une telle condition (« Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise »).
La seule condition est le fait d’être en situation de travail salarié, c’est-à-dire exercer une activité pour le compte d’un employeur situé en France en échange d’une rémunaration, y compris si ce travail n’est pas déclaré par l’employeur. D’ailleurs dans la circulaire d’application de la loi Pasqua, ce point était rappelé : « L’irrégularité de la situation d’un ressortissant ne fait pas obstacle au versement des prestations prévues au livre IV du code de la sécurité sociale » (Circulaire ministérielle D.S.S./A.A.F. n¡ 95-11 du 17 février 1995). Il s’agit d’un droit du travailleur, peu importe sa situation au regard de la législation sur le séjour. En outre, de nombreuses règles internationales dont la convention n°19 de l’OIT exigent l’égalité de traitement avec les nationaux et prohibent toute exclusion de travailleurs salariés, au motif de la régularité de leur séjour.
Nous tenons à exprimer notre solidarité à l’égard de tous les travailleurs privés de droits au séjour et victimes du travail. Nous demandons aux organisations syndicales qui siègent dans les instances paritaires du ministère du Travail et de la CNAM, de faire pression sur le gouvernment pour qu’une telle disposition, contraire aux règles internationales, ne soit pas mise en application en France.
Contacts : Annie Thébaud-Mony : 06 76 41 83 46