Les premières estimations recueillies avant publication de chiffres officiels globaux montrent que les infirmières ayant choisi la catégorie A sont moins nombreuses qu’escompté par le gouvernement. Les IDE restant en catégorie B pourraient même s’avérer majoritaires.
Trois semaines après la fin du droit d’option (1) des infirmières de la fonction publique hospitalière (FPH), il est encore difficile de se faire une idée précise de la proportion de celles qui ont opté pour le passage en catégorie A (2) et celles qui ont décidé de rester en catégorie B (3).
Premier à avoir dessiné des tendances, sur la foi d’une enquête menée par ses équipes « dans nombres de CHU et de CH », le SNPI CFE-CGC estime qu’ « une infirmière sur trois a fait le choix de la catégorie A », une sur trois celui de rester en B et qu’ « une sur trois n’a même pas jugé utile de faire son choix dans ce jeu de dupes », ce qui les maintient de facto en B. Soit, globalement, un tiers d’infirmières qui passeraient en A et deux tiers qui resteraient en B. Des proportions à peu près inverses à celles constatées par FO Santé après un sondage dans les établissements où le syndicat est implanté, dont « à peu près tous les CHU » hors AP-HP, soit environ la moitié de la profession, selon le secrétaire fédéral Denis Basset. « Il semble qu’au final, environ 60% des infirmières de soins généraux de la FPH ont opté pour le A et 40% pour le B », indique-t-il, précisant que, parmi les répondants, la répartition est de 70% de A et 30% de B. « Ce qui nous interpelle, c’est que 15 à 20% des infirmières n’ont pas répondu », ajoute Denis Basset.
A l’AP-HP, moitié A moitié B
A la DGOS, chargée de centraliser les données remontant des établissements, on se refuse à divulguer des chiffres, même provisoires. « Le décompte des données relatives au droit d’option est en cours de finalisation. Les remontées sont longues et relativement complexes à effectuer et nous ne souhaitons pas diffuser des données parcellaires », déclare Lucie Dufour, responsable medias et relations extérieures à la DGOS. « Seul un bilan complet sera en effet significatif », fait-elle valoir. Certains syndicats ayant donné la consigne de ne répondre que le dernier jour, du retard a pu être pris dans le décompte des réponses.
Au moment où nous écrivons, seules l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) sont en mesure de fournir des chiffres officiels et quasi-définitifs. A l’AP-HP, ces chiffres, s’ils sont partiels, n’évolueront plus qu’à la marge, selon la direction de la communication : sur les 18 191 réponses écrites dépouillées au 14 avril sur un total de 23 442 professionnels infirmiers (77,6%), 11 752 se prononçaient pour la catégorie A et 6 443 pour la B, soit respectivement 64,6% et 35,4% des répondants. A l’AP-HM, « sur un potentiel de l’ordre de 2 900 IDE, 1 706 ont opté pour la catégorie A » , soit près de 59% de l’effectif, indique l’attachée de communication Perrine Seghier.
Selon la Fédération hospitalière de France (FHF), les 60% d’infirmières qui avaient déjà répondu au 31 mars se répartissaient en deux moitiés. « Ce qui veut dire que sur le stock, on en a deux tiers en B et un tiers en A », observe le responsable du pôle ressources humaines hospitalières, Patrick Lambert. Une enquête de la FHF ciblée sur les CHU a par ailleurs révélé « des réponses extrêmement diversifiées en fonction de l’âge moyen des infirmières » dans chaque établissement, soulignait-il, les plus jeunes optant massivement pour la catégorie A, à l’inverse des plus âgées.
« Choix de vie »
Bilan des courses, on s’oriente vers une répartition moitié- moitié, voire vers davantage de B que de A. Ce serait un camouflet pour le gouvernement qui espérait de 60 à 80% de choix en faveur du A, source d’économies dans les dix prochaines années pour la CNRACL (4), la caisse de retraites des agents de la FPH. Et pour cause, « pour une infirmière, choisir entre catégorie A et B, ce n’est pas seulement une question de carrière, c’est aussi un choix de vie », note Patrick Lambert, de la FHF, « car en ligne de mire, il y a l’âge du départ à la retraite ». Sommées d’abandonner la reconnaissance de la pénibilité de leur travail pour gagner le droit d’être reconnues à la juste valeur de leurs études et de leurs responsabilités, nombre d’infirmières se sont cabrées. Avec pour conséquence immédiate, la cohabitation de trois statuts différents (voir encadré ci-dessous) dans les services, ce qui, pour le syndicaliste Denis Basset, revient à introduire « une césure dans la profession ».
Cécile Almendros
1- Fixée au 31 mars 2011, cachet de la Poste faisant foi.
2- Avec sensible majoration de rémunération, mais recul de cinq ans de l’âge de départ à la retraite, rappelle-t-on.
3- Avec plus faible augmentation de salaire, mais départ à la retraite entre 55 et 57 ans.
4- Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
Un métier, trois statuts
Désormais, les IDE hospitalières partiront à la retraite : entre 55 et 57 ans pour celles recrutées avant décembre 2010 et qui sont restées en B ; à 60 ans pour les IDE recrutées avant décembre 2010 et qui ont choisi le A ; à 62 ans (comme dans le privé) pour les nouvelles diplômées et les IDE recrutées depuis le 1er décembre 2010, classées d’office en A. Ces trois statuts cohabiteront jusqu’à l’extinction naturelle du corps de catégorie B pour les infirmières.