Il y avait bien longtemps que les agents de l’hôpital des enfants n’avaient pas exprimé leur colère. Des longs mois de sous effectifs, d’arrêt maladie et maternités non remplacés, d’épuisements des professionnels et de mise en place d’un management particulièrement agressif ont fait déborder le vase.Sur l’inspiration de l’Hôpital pédiatrique de Bordeaux, la CGT et les agents (AS, AP,ASH, IDE, PUER) de HE se sont lancé dans l’aventure des «pique-niques de la colère» pour «rendre visible la souffrance invisible». Cette souffrance est physique, due aux changements d’horaires intempestifs, aux jours de repos non pris, aux heures supplémentaires et à la surcharge de travail pour compenser les absences. Mais elle est aussi morale, le sentiment de ne pas pouvoir bien faire notre travail, pas « dans les règles de l’art », de risquer de commettre des erreurs, de ne pas être écouté et reconnu par la hiérarchie. Et surtout de ne pas accorder le temps et l’énergie nécessaire pour le don de soi(n) si important en pédiatrie et dans la Santé en général.
Les travaux du CHSCT sur des services comme la réanimation, l’hématologie ou le bloc opératoire, ont permis de mettre des chiffres, du concret, sur le mal être au travail et nous avons évalué à 60 ETP, le déficit du pool de remplacement, tous agents confondus dans tout le bâtiment de HE. Quatre pique-niques très conviviaux rejoints par des médecins et bien relayé par la presse nous ont permis d’obtenir un rendez vous avec le Directeur Général.
Pour calmer le feu, le DG a réorganisé le financement de la chirurgie cardiaque pour libérer plus de budget et embaucher 10 ETP de plus que le plan hivernal (20 ETP chaque année), et s’engage à remplacer un arrêt maternité sur 2 à partir de janvier. La mobilisation a payé, cela fait un peu d’oxygène mais les dysfonctionnements persistent et les budgets pris vont manquer ailleurs. La leçon est que tous les services doivent demander des effectifs en même temps pour ne plus déshabiller Paul pour habiller Jacques et obliger l’ARS à donner des rallonges budgétaires comme à l’Hôpital Marchant (423.000 euros obtenus grâce à leur mobilisation sous la tente), c’est le sens de l’«appel des pique-niques de la colère» lancé pour aider à enclencher le mouvement.