03/07/2017
Le 14 juin, cinq agents élus CGT au comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de Purpan-Est, se sont vu infliger un blâme par la direction de l’hôpital toulousain. Comme nous l’indiquions le 13 juin dernier, des procédures disciplinaires planaient au dessus de la tête de certains salariés encartés à la CGT. Elles se sont finalement transformées en sanctions. Toutes concernent des élus qui interviennent dans le secteur de l’Hôpital des enfants. Là où, en mars dernier, le cabinet d’expertise Addhoc a dû suspendre ses travaux après s’être vu reprocher par l’encadrement que son intervention constituait « un facteur de risques psychosociaux supplémentaire nourrissant un risque de suicide ». Rappelons qu’Addhoc a été chargé par le CHSCT de rédiger des rapports sur les risques psychosociaux des personnels et sur leurs conditions de travail, suite à la vague de suicides qui a endeuillé le CHU au début de l’été 2016.
Qu’ont donc fait ces salariés pour être sanctionnés de la sorte ? L’une est « intervenue sans prévenir avec d’autres représentants syndicaux » auprès d’une cadre de santé. Une autre « a pris l’initiative de photocopier la liste établie au 10 mars 2017 des sorties de l’établissement des enfants hospitalisés ». Un autre « s’est présenté dans le bureau du cadre de santé, sans rendez-vous préalable, en vue de contrôler l’élaboration des plannings du service ». Sauf que, comme le rappelle la CGT du CHU, « ces faits constituent l’activité naturelle des représentants du personnel. Que ce soit la libre circulation des élus CHSCT, la demande de documents sans autorisation, sans rendez-vous préalable, ou encore la demande d’informations auprès des cadres lorsque la réglementation n’est pas appliquée, cela fait partie de leurs missions. »
Ce que la direction reproche surtout, c’est la « manière inappropriée et agressive » des interventions de ces élus, ce qui constitue à ses yeux, « une volonté manifeste d’intimider et de discréditer l’encadrement ». Pour avancer ces accusations, elle s’appuie sur des témoignages, rapports ou déclarations d’événements écrits par des cadres et personnels du CHU. Ce que la CGT conteste vigoureusement en parlant de « dossiers à charge ».
Un fait est particulièrement accablant : le 14 mars, une cadre de l’Hôpital des enfants voit débouler trois des représentants du personnel qui viennent lui parler d’un souci de planning. « Ils m’encerclent et m’interpellent (…), écrit-elle dans un rapport à sa supérieure hiérarchique. Je réalise qu’ils me coincent (…) Je me dirige alors vers l’extérieur du service en téléphonant aux CSS (cadres supérieurs de santé) pour me réfugier dans leur bureau. Ils me poursuivent (…) Je suis désemparée et me sens agressée ». Le jour même, elle rédige un courriel de signalement « pour acte de violence » à la direction. Et le 28 avril, soit un mois et demi après les faits, elle porte plainte pour « harcèlement moral » au commissariat de police du Mirail.
Dans le procès verbal de plainte, elle raconte : « Les 3 délégués syndicaux m’ont poursuivie dans l’hôpital ». Or toute la scène a été enregistrée avec un téléphone portable. Mediacités a consulté cet enregistrement. Les trois élus se présentent sous l’étiquette CGT, sans agressivité. Mais la cadre ne veut pas discuter avec eux : « Non mais c’est bon, c’est bon, vous voyez avec les cadres sup’ et avec le DRH, mais pas avec moi ». A-t-elle été poursuivie ? Sur ce point, on l’entend très clairement dire dans l’enregistrement : « Je continue mon travail, si vous voulez me suivre, vous me suivez ». Les élus : « Mais du coup, on voit ça avec… » – la cadre s’éloigne – « madame, juste une seconde, je contacte la cadre sup’ ? » La cadre : « Vous me suivez, on y va si vous voulez ».
Les autres syndicats s’en mêlent
Contactée par Mediacités, la direction de l’hôpital « ne voit pas pourquoi il y aurait un papier là-dessus, car quand les règles sont outrepassées, il y a des procédures disciplinaires, c’est la vie d’une entreprise ». Telle n’est pas la vision de la CGT du CHU qui a donc décidé de porter l’affaire devant le tribunal administratif. Depuis, le syndicat a reçu l’appui de trois autres organisations syndicales (CFDT, FO et SUD).
Le 30 juin, celles-ci ont quitté, avec la CGT, le Comité Technique d’Etablissement (l’équivalent du conseil d’administration) « car la direction a refusé de mettre un point à l’ordre du jour concernant les sanctions disciplinaires, mutations arbitraires (NDLR : ce 3 juillet, l’ancienne secrétaire CGT du CHSCT Purpan Est est mutée à Rangueil), plaintes et mise en garde faîtes à plusieurs membres du CHSCT ». Pour eux, « ce refus viole le code de la santé publique (article 1 R.6144-40-2 sur les compétences du Comité Technique d’Etablissement) ». Et d’enfoncer le clou en dénonçant « un abus de pouvoir qui a pour conséquence de priver les organisations syndicales de leur droit d’expression et de réduire leurs possibilités d’action ». Au CHU de Toulouse, la tension est encore montée d’un cran.