Une note confidentielle de policiers et de gendarmes du service central du renseignement territorial l’annonce : les urgences hospitalières, saturées, sont au bord de l’implosion sociale.
Daniel Rosenweg | 10 Mars 2015, 07h47 | MAJ : 10 Mars 2015, 08h00
C’est une note confidentielle datée du 5 mars. Elle a été rédigée par le service central du renseignement territorial du ministère de l’Intérieur, constitué de policiers et de gendarmes. Un « état des lieux » des services d’urgences des hôpitaux à « diffusion restreinte ».
Il a été adressé aux plus hautes autorités (présidence de la République, Premier ministre, ministères de la Santé et de l’Intérieur) et pourrait bien révéler le prochain gros dossier de la ministre de la Santé.
« Le service des urgences malade d’un engorgement massif », est-il ainsi écrit en tête du premier paragraphe. Au point, précise la note, que « selon les syndicats, ce secteur semble au bord de l’implosion ».
Pas question de salaires, dans cette analyse, mais de la mise en lumière d’une dégradation des conditions de travail qui a déjà fait naître ici et là des mouvements de grève. Le plus souvent, la réduction du nombre de lits — pourtant en nombre élevé en France comparé à nos voisins européens — est évoquée comme contribuant, selon la note, à « saturer les services hospitaliers d’urgence ainsi que les unités d’hospitalisation de courte durée, en particulier avec les patients âgés ».
Ce document, que notre journal s’est procuré, cite ainsi les cas des hôpitaux de Lens (Pas-de-Calais), en grève depuis le 18 février, d’Orléans-la-Source (Loiret), où l’ensemble du personnel paramédical des urgences est en grève illimitée depuis le 1 er mars. Les cas du Mans (Sarthe), de Roanne (Loire) sont également évoqués… Sans compter la saturation des hôpitaux consécutive à la récente épidémie de grippe. A titre d’exemple, dans la région Poitou-Charentes, celle-ci n’a épargné « aucun des hôpitaux, que ce soit à Poitiers, Angoulême, La Rochelle, Niort ou encore Thouars ».
Et la note de mettre en garde contre un risque social : « Compte tenu de la fragilité économique des établissements hospitaliers et des annonces de restrictions budgétaires, quelques mouvements de protestation pourraient prendre corps. »
Interrogée sur ce document, Marisol Touraine, la ministre de la Santé, veut relativiser : « L’hiver est une période de grande fatigue pour le personnel des urgences qui a été confronté cette année à une épidémie de gastro à Noël, puis une importante épidémie de grippe. Il peut y avoir des situations de crise localement, nous les avons identifiées, nous les suivons de près avec les agences régionales de santé. »
La ministre met aussi en avant « le travail conduit depuis un an avec les urgentistes pour régler, notamment, le problème des lits et fluidifier le parcours des patients ». Elle rappelle aussi l’accord, signé le 23 décembre, après un jour de grève, qui instaure un paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 heures et jusqu’à 48 heures hebdomadaires.
Il reste la note et son constat. Elle parle de manque de médecins dans les maisons de retraite, de manque de disponibilité des médecins de ville, de moins en moins nombreux… Un vrai chantier. Difficile à conduire à l’heure des économies.