Une brancardière du CHU de Toulouse, qui avait fait une tentative de suicide en 2012, est en grève de la faim depuis quelques jours. Son combat.
Par Anthony Assemat
Non, tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes au CHU de Toulouse. Très régulièrement cité en exemple dans les palmarès établis par la presse nationale, le CHU de Toulouse fonctionne grâce au dévouement et à la solidarité de ses salariés. Jusqu’à que la corde cède.
Le 14 mai 2012, Sylvie, brancardière au CHU qui « sert la fonction publique hospitalière depuis 1999″, « épuisée », fait une tentative de suicide sur son lieu de travail. « C’est une première chez nous, on n’a jamais vu ça », indique, encore choqué, un syndicaliste de la maison. Alors que Sylvie, qui doit reprendre son poste d’ici le mois d’avril, est en arrêt maladie ordinaire jusqu’à présent, la direction a fait remonter son cas à la Commission médicale départementale, « qui l’a jugé apte à reprendre le travail » nous précise-t-on.
En grève de la faim devant l’Hôtel Dieu à partir du lundi 24 mars
Or, depuis deux ans, Sylvie tente de faire reconnaître sa tentative de suicide en accident de travail. Sans succès… Alors, la brancardière du CHU s’est mise en grève de la faim depuis le début de la semaine et devrait s’installer devant l’Hôtel Dieu de Toulouse à partir de ce lundi 24 mars au matin.
Son témoignage bouleversant
En 2012, le syndicat CGT publiait Lutter pour mieux soigner, un recueil de textes d’agents du CHU de Toulouse.
Voici ce qu’écrivait Sylvie, « 48 ans, avant une tentative de suicide sur son lieu de travail ». Un témoignage bouleversant.
« Il faut que ça se sache »
« Je sers la fonction publique hospitalière depuis 1999. Cela fait quelques années que je bataille pour nos conditions de travail ou les conditions de vie des patients.
Je m’en suis épuisée.
J’ai un dossier jaune à la maison qui résume un peu ma vie au boulot, des copies de lettre etc, puis les fameuses notes et appréciations annuelles. Toujours bonnes ! Et pourtant…
Il faut que cela se sache, le public doit savoir, que l’hôpital est capable de faire un vrai travail social pour certains et tout autant en abattre d’autre à sa guise et sans état d’âme.
Oui, après plusieurs mois d’arrêt maladie pour burn-out et dépression réactionnelle. Mr P., à la médecine du travail m’a vue en mauvais état, j’ai décidé de partir en formation de reconversion. Espaces verts.
Trois mois avant la fin de cette formation, je fais des démarches écrites auprès de l’hôpital afin d’envisager légalement et sereinement ma nouvelle vie professionnelle en dehors de la fonction publique hospitalière.
Je suis complètement ignorée, je relance, personne ne répond, je suis donc contrainte de réintégrer l’hôpital le 10 mai 2012.
On me dit que je n’ai rien à faire à l’hôpital. Je reste et je travaille. Je reviens travailler le 11 mai, on me dit de repartir car je suis en disponibilité à compter de ce jour. Je n’ai aucun document.
Je ne me sens pas traitée comme un être humain, je suis dépitée, je suis à la porte et sans revenu, du jour au lendemain. Je fais intervenir la CGT en urgence. On verra lundi…
Lundi 14 mai, je reviens travailler quand même, le coeur gros et ma dignité qu’ils ne m’enlèveront jamais. Il faut que ça se sache, ils poussent les gens à bout, à l’agressivité entre collègues, à la division, à l’épuisement, à partir… »
comme indiqué précédemment, je suis consternée par cette violence que ce CHU entretient à l’égard de certains agents, cette direction qui est déshumanisée et se permet ce qu’elle veut et je peux en témoigner …
merci beaucoup au journaliste pour cet article dans La voix du Midi
Je suis de retour chez moi avec mon mari, suite à cette grève de la faim. 10 jours pour moi et 4 jours pour mon mari. Nous avons accepté d’y mettre fin jeudi à 17h jeudi 27 mars après l’accord signé par des membres de la DRH du CHU de Toulouse à l’Hôtel Dieu, lieu de notre sit-in sur le pont neuf.
Anthony Assemat journaliste de La voix di Midi a publié ce que j’ai écrit en plein désespoir « il faut que ça se sache ». j’en ai encore le cœur qui se serre à la lecture de mon appel au secours.
Je signale à cette occasion, que JAMAIS !!, malgré plusieurs demandes écrites et jusqu’à ce jour , bien avant et pendant la fin de notre grèves de la faim, je n’ai pu rencontrer , voir et discuter avec Mr LEGLISE Directeur Général CHU de TOULOUSE, qui a préféré resté caché. HONTE à la DIRECTION DU CHU DE TOULOUSE. C’est scandaleux.
le communiqué suivant en explique pourquoi avons accepté de cesser cette grève qui aurait pu durer longtemps.
nous tenons à remercier tout le monde, nous ne voulons oublier personne, pardon si c’était le cas, les citoyens dans la rue lors de notre sit-in avec leur soutiens et témoignages, les syndicats, les médecins et infirmières en activité venus nous soutenir et surveiller notre santé bénévolement, les collègues toujours en activité et d’autres en retraite bien méritée, les amis, notre famille, tous les journalistes et même la Dépêche qui a fait une énorme boulette dans son 1er article…que moi et mes collègues, qui m’ont soutenus jusqu’à ce jour ainsi que par deux mois de grève suite à ma Tentative de Suicide, avons pris de plein fouet. merci aux jeunes apprentis étudiants journalistes qui sont venus nous voir, nous écouter, nous filmer et recueillir notre témoignage, merci aux jeunes journalistes d’une radio local en Ariège qui sont venus nous voir, merci à tout le monde.
Un grand Merci à Elisabeth DES pour son constant soutien et auteur du livre : LE HARCELEMENT AU TRAVAIL. MEMOIRE D’UN COMBAT, avec la préface du DR Jacques Giron – présent à nos cotés toute cette semaine- et la postface de Vincent Duse ouvrier sur le site de PSA Mulhouse.
SYLVIE et JEAN-MARC
« Communiqué de presse le 27 mars 2014:
Sylvie-Jean-Marc-fin jeûne
C’est aujourd’hui à 17h, pendant le rassemblement de soutien que Sylvie et son mari ont cessé leur grève de la faim après respectivement 10 et 3 jours de jeûne.
Aujourd’hui, un accord avec la direction du CHU de Toulouse a été trouvé avec la médiation de l’inspecteur du travail.
– Une indemnité de départ de 12 mois de salaires brut lui a été accordée, validant son souhait de quitter le CHU de Toulouse depuis son burn-out professionnel et couvrant une grande partie des frais et pertes financières qu’a entraîné sa situation.
– La possibilité de prendre ses congés non pris de 2013 et 2012
– La suppression de son engagement de servir suite à une formation professionnelle.
Cet accord permettra de faire face à l’urgence financière et de pouvoir envisager son avenir loin des dysfonctionnements et tensions qui ont ponctué son histoire. La procédure de reconnaissance de sa tentative de suicide sur le lieu de travail continue au Tribunal Administratif et en cas de victoire permettra la compensation financière de l’intégralité des frais et pertes sans remettre en cause l’indemnité accordée par le CHU de Toulouse.
Pendant le rassemblement de soutien, Sylvie a déclaré qu’elle n’incitait personne à la grève de la faim mais que les circonstances lui ont conduit à faire cet acte pour retrouver sa liberté et sa dignité et qu’elle va pouvoir commencer à se reconstruire grâce à cet accord. Elle a remercié tous ceux qui l’on soutenu, ses anciens collègues et les personnes dans des situations similaires à la sienne qui se sont manifestés pendant ces derniers jours.
Elle espère que cet évènement va faire prendre conscience de l’importance de la prévention et de la reconnaissance du burn-out professionnel en particulier et de la souffrance au travail en général.
Elle espère que le CHU de Toulouse va changer sa manière d’appréhender ces questions. Elle incite tout le monde à se battre individuellement et collectivement contre les injustices dans le travail et remercie sa famille, les organisations syndicales CGT et SUD et les personnalités qui ont constitué son comité de soutien.
Toulouse, le 27 mars 2014″
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» De : BOURGADE Frédéric
Date : vendredi 28 mars 2014
Objet : Fin de la Grève de la Faim de Sylvie Bove Belmudes.
À : CGT CHU TOULOUSE
Bonjour,
Je suis Fréderic bourgade journaliste France info à Toulouse.
Je suis passé hier matin voir la gréviste de la faim et son époux.
Ma radio diffusera demain sur sa lutte concernant le burn out..
La chronique est multi diffusée et concerne de fait au moins 3 millions de personnes qui chaque année en France sont victimes d’un burn out.
Merci à vous
Fréderic Bourgade France info 06.14.67.97.56 «